News / Brèves
Back to previous selection / Retour à la sélection précédente

Intervention en Irak : assez d’hypocrisie

Printable version / Version imprimable

Pour Hussein Askary, président de l’EAP, Suède et responsable du Moyen Orient pour la revue Executive Intelligence Review, les appels de dirigeants occidentaux à une intervention militaire en Irak sont « non seulement hypocrites, mais criminels ». Si les hommes politiques occidentaux cherchent à « tirer profit de cette situation sans indiquer ou reconnaître les véritables causes de la crise humanitaire et sans modifier la politique qui en est responsable, nous ne pourrons jamais sortir de l’enfer d’un nouvel âge de ténèbres  ».

L’existence de l’EIIS et son expansion sont le résultat de leur soutien et du soutien d’autres pays membres de l’UE et de l’OTAN, ainsi que de leurs amis en Arabie saoudite, au Qatar et au Koweit, à la politique anglo-américaine de « changement de régime » qui a sévi en Irak (2003), en Libye (2011) et en Syrie (depuis 2011). Cette même politique avait été prononcée dès 1999 par Tony Blair et défendue par lui en 2004 comme la fin du système d’États-nations souverains inauguré par les traités de Westphalie.

C’est l’assaut contre la souveraineté et l’indépendance des États-nations et la destruction de leurs institutions d’État relativement modernes, comme l’armée, la police et les forces de sécurité, et contre l’infrastructure de santé, d’éducation et de transport plus généralement, qui a créé le chaos et le vide dont devaient profiter ultérieurement des groupes terroristes comme al-Qaïda, Ansar Al-Sharia, Jabhat Al-Nousra et l’État islamique, une métamorphose de l’EIIS.

Les États-Unis et la Grande-Bretagne « ont sciemment suivi une politique bien définie visant à permettre à ces groupes d’obtenir du pouvoir, des armes et du soutien financier et médiatique soit directement par le biais de la CIA, du MI6 et des Forces spéciales (SAS) britanniques, soit indirectement en passant par les agents des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne dans la région, dont l’Arabie saoudite, le Qatar, d’autres pays du Golfe, la Jordanie et la Turquie, qui est membre de l’OTAN. » Il n’est pas possible, estime Askary, d’éliminer l’EIIS en Irak tout en soutenant ses alliés en Syrie.

Askary rejette d’office l’argument des Anglo-américains selon lequel c’est «  le refus de la communauté occidentale d’intervenir à temps en Syrie pour empêcher le carnage qui a amené l’Irak dans le bourbier », la même pirouette de style utilisée par François Hollande dans un entretien au quotidien Le Monde du 20 août : « Si, il y a deux ans, il y avait eu une action [de la communauté internationale] pour installer une transition, nous n’aurions pas eu l’Etat islamique. Si, il y a un an, il y avait eu une réaction des grandes puissances à la hauteur de l’utilisation (par Bachar Al-Assad) des armes chimiques, nous n’aurions pas été face à ce choix terrible entre un dictateur et un groupe terroriste, alors que les rebelles méritent tout notre soutien ». En effet, en Libye, l’Ouest a réagi « à temps » en éloignant Kadhafi du pouvoir. Et le résultat ? «  Les frères d’armes d’al-Qaida et les jumeaux idéologiques de l’EIIS sont en passe de créer le chaos à Tripoli et à Benghazi. »

Il est temps de mettre fin à l’hypocrisie, s’écrie Askary. Le tribunal de Nuremberg a établi une nouvelle norme destinée à empêcher le génocide par des entités puissantes : "savait ou aurait dû savoir". La même norme doit être appliquée aujourd’hui à l’égard des puissances et des personnes qui ont créé les conditions d’un génocide en Syrie, en Irak et en Ukraine orientale, si nous voulons vivre dans une communauté mondiale humaine digne de ce nom.