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Corées : tremplin vers la paix mondiale ?

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Karel Vereycken

S&P—Demain, le 12 juin, sauf si un évènement majeur vient perturber la fête, aura lieu à Singapour un sommet qui s’annonce historique entre le président nord-coréen Kim Jong-un et son homologue américain Donald Trump.

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Contrairement à ce qu’essaieront de nous faire croire les grands médias américains, son éventuel succès n’aura pas été le résultat des pressions « maximales » imposées par les Etats-Unis, mais le fruit d’un travail long et assidu, mené en premier lieu par les patriotes coréens eux-mêmes, en coopération avec les acteurs régionaux que sont la Russie, la Chine et le Japon.

Poutine, pour qui « la Chine a fait beaucoup », a qualifié de « courageuse » et « mature » la décision de Trump d’organiser la rencontre et s’est dit « surpris » des efforts faits par la Corée du nord. « D’abord, ils ont suspendu les essais nucléaires. De plus, ils ont démantelé un de leurs plus grands sites d’essais. [Ce sont là] des signes incontestables d’une volonté d’aller vers la dénucléarisation. »

Comme la plupart des observateurs avisés, le président russe considère la dénucléarisation totale comme un horizon à long terme. L’exiger comme préalable à tout accord, comme l’avait fait John Bolton, le conseiller néoconservateur de Trump, serait la meilleure garantie d’un échec.

Je comprends les autorités nord-coréennes lorsqu’elles exigent des garanties de sécurité absolues (…) Rien d’autre ne peut se faire à la lumière de ce qu’il s’est passé en Libye et en Syrie.

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Les trois ceintures de développement économique sous discussion.

Au centre des propositions sino-russes pour inverser la logique d’affrontement, le « triangle de Tumen », un projet de développement industriel autour de l’estuaire du fleuve éponyme où le territoire nord-coréen côtoie ceux de la Russie et de la Chine. Selon Poutine, les acteurs régionaux doivent se manifester. La Russie propose des « projets économiques tripartites » avec les deux Corées, essentiellement des projets d’infrastructures.

Elle ne voit pas d’un mauvais oeil le prolongement du transsibérien (terminus actuel Vladivostok) jusqu’au port géant de Busan en Corée du Sud, via la Corée du Nord.

Nous discutons de la construction d’un chemin de fer entre la Russie et la Corée du Sud, auquel la Chine pourra contribuer. Il est également question de construire un gazoduc (…) et plusieurs centrales électriques (…) Il y a plein de projets pour des coopérations d’un format à trois ou à quatre. Il faut juste s’y mettre.

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Ainsi, si ce sommet se couronne, comme on l’espère, par la signature d’un accord de paix entre les deux Corées (enfin) et l’essor d’une renaissance économique de la Corée du Nord et de la région, il pourrait marquer la première étape de la fin de la nouvelle guerre froide qui plombe la planète.

Rappelons que depuis l’instant où, en 2016, il fut acquis que Donald Trump allait remporter la nomination républicaine, le cœur même de ce que l’économiste américain LaRouche appelle « l’Empire britannique », c’est-à-dire l’establishment militaro-financier anglo-américain, vit dans l’angoisse.

Car si Trump parvient à nouer des relations « d’entente, de détente et de coopération » avec la Russie, la Chine et l’Inde, la tutelle britannique sur Washington deviendra de l’histoire ancienne. A l’inverse – et Londres l’a bien compris – sa domination perdurera dans la mesure où les néoconservateurs, en guerre contre Trump, maintiendront le monde dans un état de guerre perpétuelle. « Diviser pour régner » reste bien la devise de cette vieille oligarchie, tant qu’on lui laisse carte blanche.

Aussi, immédiatement après Singapour, un face-à-face Trump-Poutines’impose. N’en déplaise à Emmanuel Macron, aucun des grands dossiers qui préoccupent le monde (crise économique, Iran, Syrie, terrorisme, lutte contre la drogue, exploration spatiale, etc.) ne pourra être réglé sans l’implication de ces deux grandes puissances, mais aussi de la Chine, seule capable aujourd’hui, par sa puissance économique, de provoquer l’amorce d’une relance économique dans le monde. Alors que Poutine souhaite une telle rencontre, d’après le Wall Street Journal, la Maison Blanche vient d’y donner son feu vert. Sauf, bien sûr, catastrophe d’ici là…