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journal LeMonde
Le Monde attaque la société postindustrielle mais ne voit pas un monde postfinanciarisation

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(Nouvelle Solidarité) – Dans son édition d’hier, Le Monde salue le « retour en grâce de l’industrie » dans les préoccupations politiques et enterre définitivement le mythe de la société de service.

« Ces dernières années, la thèse selon laquelle le basculement d’une économie basée sur l’industrie vers une économie de services était inéluctable a fait florès. (…) La crise provoque aujourd’hui un réveil douloureux. La réalité s’impose : sans industrie, difficile de créer de l’emploi, de nourrir la croissance (…) Cette prise de conscience est tardive, et les dégâts provoqués par la consécration de la société « postindustrielle » sont considérables. (…) On a cru un temps que la perte [des industries] serait compensée par la croissance des services. Mais on a un peu vite oublié que l’industrie constituait le premier client des services et que, si l’on faisait disparaître la première, on ne pourrait pas faire prospérer les seconds. »

Si l’on ne peut que se féliciter de cette soudaine prise de conscience, il est de notre devoir de soulever deux questions fondamentales sans lesquelles parler d’industrie revient à prêcher dans le vide.

Il n’y aura pas de retour à une société de production sans mener le combat contre les intérêts financiers
La société postindustrielle est née en 1971 du démantèlement du système de Bretton Woods par l’oligarchie financière, dont le principe de taux de change fixes protégeait les monnaies et les industries nationales. Entre la fin de la Deuxième Guerre mondiale et les années 1970, Europe et Etats-Unis fonctionnaient sur la base d’une politique de crédit public où l’émission monétaire souveraine finançait le développement de l’infrastructure, la recherche technologique et la recherche fondamentale. Dès lors que l’on a laissé la City de Londres, Wall Street et leurs collaborateurs de tous pays s’emparer du crédit, l’on a signé le démantèlement des Etats-nations Républiques où l’industrie et l’ensemble des activités de production permettaient de financer les systèmes sociaux et les services publics voulus à la Libération et inscrits dans nos Constitutions. Aujourd’hui, la seule solution pour rétablir une croissance physique et sociale à long terme est de liquider le pouvoir des spéculateurs grâce à une procédure de Glass-Steagall global, étape incontournable avant de pouvoir rétablir un Nouveau Bretton Woods et des banques nationales finançant la production.

Pour que production rime avec développement, la politique industrielle ne doit pas se faire les uns contre les autres, mais les uns avec les autres
Le « retour en grâce de l’industrie » s’opère dans un contexte de guerre économique de chacun contre tous : Europe contre Etats-Unis, France contre Allemagne, Europe contre Chine, etc. Avec une économie mondiale incapable d’offrir une vie digne à l’humanité et menacée par l’effondrement de la bulle financière et monétaire mondiale, les politiques industrielles des différents Etats sont vouées à l’échec et ne pourront que sauvegarder tout au plus quelques grand conglomérats hautement technologiques mais incapable de subvenir aux besoins accrus de populations grandissantes. Seule une approche proposant de grands projets d’infrastructure continentaux et transnationaux – les corridors de transport et de développement Europe-Asie (« Pont terrestre eurasiatique »), le projet Transaqua pour l’Afrique subsaharienne, le projet de production d’eau et d’énergie NAWAPA en Amérique, etc. – est à même d’établir les bases d’une croissance pour tous et pour longtemps, en accroissant sans commune mesure la capacité d’accueil humaine de la Terre. Là encore, ce monde ne sera pas si on laisse les puissances financières mener à terme le démantèlement des Etats-Nations souverains, comme on le voit brutalement à l’œuvre aujourd’hui en Europe.

L’industrie, c’est la création, la production, la transformation. Tout changement politique doit être porté par ce sens que chaque être humain peut, et doit pouvoir, contribuer à cette transformation du monde.