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Rapport sur une banque nationale - Alexander Hamilton

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Alexander Hamilton (1755-1804) créa la première Banque nationale des États-Unis. Par opposition au système de banques centrales privées, le système de banque nationale donne à l’État la capacité unique d’émettre du crédit et, par conséquent, de diriger ce crédit vers une activité nécessaire à l’intérêt général. Nous publions ici des extraits de son Rapport sur une banque nationale, présenté au congrès en 1790.

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La première banque nationale des États-Unis à Philadelphie.

Le Secrétaire rapporte respectueusement : « [...] Qu’une banque nationale est un instrument de première importance en vue d’une administration prospère des finances et serait de la plus grande utilité pour les opérations en rapport avec la promotion du crédit public […]

Voici quelques-uns des principaux avantages d’une telle banque :

L’augmentation du capital actif ou productif d’un pays.

L’or et l’argent, s’ils sont utilisés simplement comme instrument d’échange et d’aliénation ont été dénommés non sans raison capital mort [improductif, Ndr] ; mais s’ils sont déposés dans une banque, pour devenir la base de la circulation de papier [monnaie fiduciaire ou scripturale, Ndr], qui prend leur caractère et place comme signes ou représentants de la valeur, alors ils acquièrent la vie ou, en d’autres termes, une qualité active et productrice [...] il va de soi, par exemple, qu’une monnaie détenue dans son coffre par un marchand qui attend une opportunité pour l’employer, ne produit rien jusqu’à ce que l’opportunité se présente. Mais, si au lieu de séquestrer son argent de cette manière, il le dépose à la banque ou l’investit dans le capital d’une banque, il apporte un profit dans l’intervalle [...]. Son argent ainsi déposé ou investi constitue un fonds, à partir duquel lui-même ou d’autres peuvent emprunter des quantités bien plus élevées, C’est un fait bien établi que les banques en bon crédit peuvent faire circuler une plus grande somme que la quantité qu’elles détiennent effectivement en or ou en argent. [...]

L’une des propriétés des banques est d’accroître le capital actif du pays [...] l’argent de tel particulier, alors qu’il est déposé en sécurité à la banque ou investi en action, est en mesure de satisfaire aux besoins d’autres, sans pour autant être soustrait de son propriétaire [...].

Cela génère un profit supplémentaire, venant de ce qui est payé par d’autres pour l’usage de son argent, alors que lui-même n’est pas en mesure d’en faire usage ; la monnaie est ainsi dans un état d’incessante activité. [...]

La faculté de la banque de prêter et de faire circuler une somme supérieure au montant de son actif en pièces métalliques génère, au service du commerce et de l’industrie, une augmentation nette du capital. Les achats et les créations d’entreprise peuvent en général être réalisés par une somme donnée en papier bancaire ou en crédit, aussi efficacement qu’une somme égale d’argent et d’or. Ainsi, en contribuant à élargir la masse des entreprises industrielles et commerciales, les banques deviennent les nourrices de la richesse nationale [...].

Qu’est-ce que la richesse ? [...]

La richesse intrinsèque d’une nation ne se mesure pas par l’abondance du métal précieux qu’elle recèle, mais par la quantité et les productions de son travail et de son industrie [...]. Il est certain que la stimulation de l’industrie à l’aide d’un système de crédit papier adapté et bien régulé, est à même de compenser, et au-delà, la perte d’une partie de l’or et de l’argent d’une nation [...]. Une nation qui n’a pas de mines sur son sol doit obtenir le métal précieux d’ailleurs, généralement en échange des produits de son travail et de son industrie. La quantité qu’elle possédera sera en principe déterminée par le solde, favorable ou défavorable, de sa balance commerciale ; c’est-à-dire selon la proportion entre sa capacité à répondre à la demande étrangère et son besoin de marchandises étrangères, soit la différence entre le montant de ses importations et le montant de ses exportations. Ainsi, l’état de l’agriculture et des manufactures, la quantité et la qualité de la main-d’œuvre et de l’industrie doivent influencer et déterminer l’accroissement ou la réduction du stock d’or et d’argent.

Si tout cela est vrai [...], des banques bien constituées [...] augmentent de différentes façons le capital actif du pays. C’est précisément cela qui génère l’emploi, qui anime et accroît le travail et l’industrie. Toute addition qui contribue à mettre en œuvre une plus grande quantité des deux, tend à créer une plus grande quantité des produits des deux : et, en fournissant plus de biens pour l’exportation, conduit à une balance commerciale plus favorable et en conséquence à l’introduction d’or et d’argent.

Le soutien à l’industrie est […] d’une plus grande utilité pour corriger une balance commerciale déficiente qu’aucune réduction dans les dépenses des ménages ou des individus : et la stagnation de l’industrie plongera à coup sûr le déséquilibre que ne pourra supprimer une politique de restriction des dépenses.

Pourquoi une banque nationale ? [Hamilton donne plusieurs raisons pour lesquelles des banques privées existantes ne peuvent jouer le rôle de banque nationale et pourquoi une nouvelle banque doit être créée. [...]

La dernière raison [...] est la nécessité de se protéger d’influences étrangères qui pourraient s’infiltrer dans la direction d’une banque. Une prudence raisonnable interdit à toute personne qui ne serait pas citoyen des États-Unis de devenir le directeur de la Banque nationale, ou que des étrangers non résidents puissent influencer la désignation de directeurs par le vote de leurs représentants [...].

On doit considérer qu’une telle banque n’est pas du ressort de la propriété privée, c’est une machine politique de la plus haute importance pour l’État. »