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Tueries de masse aux États-Unis : miroir du pessimisme culturel occidental

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S&P—Les deux tueries qui viennent d’avoir lieu, le 23 janvier dans le Kentucky et le 14 février en Floride, sont le reflet tragique de la désintégration économique et sociale dans laquelle la quasi totalité des sociétés occidentales continuent de sombrer – les États-Unis étant plus vivement frappés, principalement en raison du découplage relativement plus avancé entre l’économie réelle et la pompe à finance du complexe militaro-financier. En effet, les suicides y sont en augmentation, l’espérance de vie baisse, et des millions d’américains basculent dans les drogues, les « médicaments » psychotropes ou opiacés.

Ne pas replacer ces drames dans ce contexte plus large conduit fatalement à de faux débats. Comme l’avait dit Jacques Cheminade lors de la dernière campagne présidentielle, « si nous vivons une occupation financière qu’il faut combattre, nous sommes en même temps soumis par ces forces financières à une occupation culturelle. Le dénominateur commun est de propager une conception du monde fondée sur la perception immédiate, la possession, la cupidité et l’absence de respect de l’autre entretenant un sommeil de la raison qui engendre des monstres ».

C’est à la suite de l’assassinat du président John F. Kennedy, avec la contre-culture qui a envahi les États-Unis après, que ce paradigme de pessimisme culturel s’est abattu sur l’ensemble du monde transatlantique. Auparavant, dans le contexte de l’optimisme insufflé par le progrès économique, social et scientifique, et malgré une législation sur les armes aussi laxiste qu’aujourd’hui, ce phénomène de tueries de masse existait, mais pas dans de telles proportions.

Pour le gouverneur du Kentucky Matt Bevin, qui appelle à ouvrir d’urgence un débat national, il faut mettre fin à la culture de la mort omniprésente dans toute l’industrie de divertissement aux États-Unis : « Nous ne devrions pas être choqués par ces meurtres, compte tenu de toute la violence qui nous entoure, nous et nos enfants », dit-il, dans une vidéo réalisée suite au drame du 23 janvier, et qui suscite une forte polémique dans le pays. « Regardez notre culture populaire. Regardez nos films. La violence, le mépris de la valeur de la vie humaine... Nous avons une culture de la mort en Amérique. Nous pouvons le nier ; nous pouvons penser que les gens peuvent faire la part des choses entre la fiction et la vie réelle, mais ils y sont immergés à chaque instant, à travers la télévision, le cinéma, la musique, etc. Écoutez les paroles de la musique actuelle ; elles célèbrent une culture de la mort ».

Dégrader l’image de l’homme au profit de la guerre permanente

En 1999, au lendemain du « massacre de Columbine », l’économiste et homme politique Lyndon LaRouche avait écrit que ce qui avait frappé cette ville de Littleton, dans le Colorado, représentait « un présage de notre époque. Comment est-il possible de corrompre des enfants innocents en les transformant en tueurs psychotiques ? Voici une réponse simple : en déshumanisant l’image de l’homme. Et il n’est pas exagérément simpliste de dire qu’une fois que ce premier pas est franchi, la base axiomatique a été posée à partir de laquelle lancer des guerres, et tuer, deviennent un jeu d’enfant ». Et en effet, suite à Columbine, suite à la diffusion massive de cette culture par les jeux vidéos, 31 massacres ont eu lieu dans des écoles américaines, sur fond des guerres des administrations Bush et Obama en Afghanistan, en Irak, en Libye et en Syrie.

Dans un podcast publié le 21 février sur le site who.what.why, la lanceuse d’alerte Coleen Rowley, ancienne agent du FBI et membre des Veteran Intelligence Professionals for Sanity (VIPS), pointe du doigt le rôle essentiel que jouent les médias et certaines institutions américaines pour répandre cette culture de la violence. « La CIA et le Pentagone ont apporté leur soutien, en contribuant à la réalisation d’environ 1 800 films », affirme-t-elle, en désignant par exemple « American Sniper » (2014) et « Zero Dark 30 » (2012), ou même, il y a plus longtemps, le rôle d’Arnold Schwarzenegger dans « The Terminator » (1984). « Le héros doit être un personnage ayant subi un préjudice, une injustice », affirme Rowley ; «  et puis à la fin, ce genre de personnage tire sur tout le monde... Une personne souffrant de troubles mentaux ou émotionnels s’identifie à ce type de héros. Il y a même des cas de suicide. On sait par exemple que lorsque quelqu’un se suicide, l’impact sur son entourage est tel que cela peut en pousser certains à l’imiter ».

Rebâtir une culture de la vie et de la découverte

Contrairement à ce que la grande majorité des gens pensent, il est tout à fait possible d’en finir avec cette culture mortifère. Elle n’est pas une fatalité. La culture n’est pas un simple produit de forces aveugles, qu’il s’agisse des caprices de la nature ou de « l’esprit du temps », comme on le disait au XIXe siècle.

Dans son projet pour la présidentielle de 2017, Jacques Cheminade écrivait : « La culture, c’est l’esprit, l’intention qui anime une société. C’est tout ce qui concourt à la découverte de la vérité que la simple perception des sens ne nous permet pas d’appréhender. Mon but est de susciter l’environnement nécessaire pour que puisse apparaître une culture qui élève les êtres humains et non qui les abaisse, une culture qui s’adresse en eux à ce qu’il y a de proprement humain et de grand, et donc de créateur, et non à ce qu’il y a de bestial et de petit. Je dis bien ‘créer l’environnement’ et non imposer un modèle ou un contenu par injonction. Il s’agit d’arroser pour que poussent de belles plantes, parfois inattendues, et non de creuser des ornières ».

L’on ne pourra donc défaire cette culture de la mort qu’en élevant les populations américaines et européennes, en les faisant retrouver un sens de dignité et de fierté à travers la (re)découverte de notre histoire et en particulier de ce que celle-ci nous a laissé de plus beau en héritage. Les Nouvelles Routes de la soie lancées par la Chine de Xi Jinping en 2013 nous offrent une extraordinaire plate-forme pour le faire, car cela définit une base nouvelle pour les relations entre les nations, jetant à la poubelle la logique de pillage et de guerre qui a dominé la mondialisation financière jusqu’à aujourd’hui.