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Grève de masse au Chili pour enterrer le libre-échange de l’ère Pinochet

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(Nouvelle Solidarité) — Depuis juin dernier, des centaines de milliers de Chiliens manifestent pour protester contre le système d’éducation privé légué au pays par la dictature du général Pinochet, dont les coûts sont devenus si prohibitifs que seuls les plus riches peuvent désormais se payer des études de haut niveau. 15 ans d’endettement pour 5 ans d’études, clament les manifestants dans les rues. Près de 500 000 étudiants et autres ont manifesté dans une dizaine de villes, le 9 août dernier, 150 000 rien que dans la capitale Santiago, et les actions se sont poursuivies pendant tout le mois.

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Bien qu’à travers toute l’Amérique latine, le système d’éducation public jouissait jusqu’à cette époque d’une réputation relativement bonne, la dictature chilienne a procédé au démantèlement systématique de l’enseignement supérieur, souvent aussi bastion de l’opposition au régime.

Le mouvement, lancé par la Fédération des étudiants chiliens (CONFECH), l’Association nationale des enseignants et l’Association des étudiants du secondaire, est rejoint de plus en plus par d’autres secteurs de la société, dans un processus de dépassement des intérêts catégoriels typique des grèves de masse. Certains commentateurs commencent d’ailleurs à parler d’ « Hiver chilien » , le comparant au « Printemps arabe » . Plus généralement, la question de l’éducation est devenue le symbole du mécontentement général contre le modèle de libre échange désastreux légué par la dictature de Pinochet.

Le Président Pinera, fils de Jose Pinera, un ancien collaborateur du régime de Pinochet et architecte de la très contestée privatisation des retraites, est désespéré, sa cote de popularité étant passée de 31% à 26% en moins de dix jours. Le 11 août, face à la détermination du mouvement étudiant, il a réuni son Conseil des ministres pour tenter de trouver une issue au conflit. Il s’est déclaré prêt à rencontrer les étudiants, tout en refusant toujours de discuter d’autre chose que de son nouveau projet d’éducation en 21 points, bien qu’il ait déjà été rejeté par les opposants. Le principal slogan dans les manifestations du 9 août était : « Il est en train de tomber, il est en train de tomber, le système d’éducation de Pinochet est en train de tomber ! »

Les forces de l’ordre ont riposté par une répression féroce, utilisant des gaz lacrymogènes, des canons à eau ainsi que des provocateurs cagoulés infiltrés dans les manifestations. 397 personnes ont été arrêtées à Santiago. Le dirigeant de la CONFECH, Camilo Vallejo, a reçu des menaces de mort, y compris d’un responsable du ministère de la Culture qui a diffusé lui-même ses menaces via Twitter . Faute d’arguments, Carlos Larrain, le président du Parti de la rénovation nationale de Pinera, en est réduit à qualifier les contestataires de « subversifs inutiles » .

Une autre manifestation monstre, baptisée « manifestation des parapluies » car la pluie tombait dru, a eu lieu le 18 août, rassemblant 100 000 personnes à Santiago et 50 000 en province. C’est la sixième marche organisée depuis juin. Le dimanche 21 août, c’est le stade O-Higgins de la capitale qui fut rempli à craquer par une manifestation pacifique où grands-parents, parents et enfants manifestaient main dans la main. Entretemps, le « cacerolazo » (son produit par des casseroles sur lesquelles on cogne) est devenu un outil privilégié de contestation à travers le pays. Tous les soirs, à partir d’une certaine heure, les opposants font sonner les casseroles de façon coordonnée.