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Assassinat du général Soleimani : un nouveau Sarajevo ?

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S&P—Le président Trump a ordonné le 3 janvier l’assassinat du général Qasem Soleimani, le numéro deux du régime iranien. Après avoir longtemps résisté face aux faucons de sa propre administration, qui réclament une guerre contre l’Iran, il a fini par céder, créant ainsi le risque d’une guerre à l’échelle de l’Asie du Sud-Ouest et au-delà.

Le général Qasem Soleimani, commandant de la force Al-Qods des Gardiens de la Révolution iraniens, a été assassiné par les États-Unis près de l’aéroport de Bagdad, le 3 janvier 2020. Les frappes, ordonnées par Trump en personne et réalisées par drone, ont également causé la mort d’Abou Mehdi al-Mouhandis, le numéro deux des Unités de mobilisation populaire Hachd al-Chaabi, une armée d’environ 80 000 Irakiens fidèles à l’Iran.

Ces assassinats ont fait suite à l’attaque deux jours plus tôt de l’ambassade des États-Unis par des manifestants pro-Iraniens à Bagdad, qui n’ont causé aucune victime. Pour l’ancien diplomate américain Chas Freeman, « il ne s’agissait pas de représailles, comme cela a été dit, mais de l’exploitation pré-programmée d’un prétexte pour assassiner un dirigeant étranger désigné comme un ennemi, a-t-il écrit dans une tribune publiée sur le site JackMatlock. C’était un acte de guerre qui conduira inévitablement à des représailles ».

Marche vers la guerre

Dans une lettre adressée au président, le Veteran Intelligence Professionals for Sanity (VIPS), un collectif d’anciens professionnels du renseignement américain, souligne que l’assassinat du général Soleimani « rappelle à la mémoire l’assassinat de l’Archiduc autrichien Ferdinand en juin 1914 [à Sarajevo], qui mena à la 1ère Guerre mondiale ». Ali Khamenei, le guide suprême de la révolution iranienne a immédiatement prévenu qu’une « vengeance sévère attend les criminels » qui sont derrière les frappes. « Que l’Iran riposte au moment et lieu de son choix est une quasi-certitude, écrivent les VIPS. Et l’escalade vers la 3ème Guerre mondiale n’est désormais plus une lointaine possibilité, en particulier en raison de la multitude de cibles offertes par notre présence militaire importante dans la région et dans les eaux environnantes ».

Le problème est que, contrairement à ce que croient les gens de l’administration américaine, l’Iran n’est pas un pays isolé. Les VIPS soulignent que la semaine dernière la République islamique a justement participé à ses premiers exercices navals conjoints avec la Russie et la Chine dans le Golfe d’Oman.

« Je crains que le président Trump et ses conseillers n’aient pas réfléchi aux conséquences lorsqu’ils ont décidé d’ordonner l’assassinat de Soleimani, écrit l’ancien analyste de la CIA Larry Johnson, l’un des membres des VIPS, sur le blog Sic Semper Tyrannis. Il ne suffit pas de vouloir ’donner une leçon à l’Iran’. La plupart des Iraniens et une grande partie de la population shiite irakienne voit tout simplement cette action comme l’équivalent du bombardement de Pearl Harbor par le Japon en 1941. (…) On voit mal l’Iran se contenter de quelques protestations ou opter pour la retenue ».

Motivations internes

Comme le fait remarquer Chas Freeman, cette attaque n’a aucun sens en terme de politique étrangère américaine. En effet, elle pousse davantage l’Irak dans les bras de l’Iran ; elle met en danger la vie de tous les Américains qui se trouvent là-bas, en faisant de chacun d’eux autant de cibles pour des assassinats ou des prises d’otage. De plus, l’escalade militaire est contraire aux promesses de Trump auprès de son électorat, et pourrait lui coûter sa réélection. « Il s’agit d’un mouvement sans stratégie, équivalent au début d’une partie d’échec où le joueur avance en n’ayant qu’un seul coup à l’esprit », écrit l’ancien diplomate.

Le choix de l’attaque a sans doute entièrement été dicté par les turbulences en cours dans la politique interne aux États-Unis. « Les assassinats semblent destinés à apaiser les critiques des néoconservateurs dans le camp du président Trump, qui blâment son hésitation et sa faiblesse face aux ripostes iraniennes (…), poursuit Freeman. Ils fournissent une distraction à la procédure d’impeachment et font appel aux instincts sanguinaires des supporters les plus ardents de Trump ».

Dans un entretien à l’agence de presse iranienne Tasmi, Hussein Askary ...suite