Lyndon H. LaRouche
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Finies les mesurettes ! L’exploration spatiale sera le vecteur du développement

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Parce que l’exploration spatiale est l’avenir de l’humanité et que Monsieur LaRouche y développe pleinement sa conception des choses, voici la traduction française d’un échange ayant eu lieu entre Lyndon LaRouche et un économiste associé au Groupe de Stanford [1], lors de sa conférence internet du 8 septembre 2009.

Question : Monsieur LaRouche, depuis 25 ans, aucun président, qu’il soit démocrate ou républicain, n’a pris au sérieux la nécessité pour les États-Unis d’être dotés d’une industrie de rang mondial. Après tout, on nous a dit que la modernité c’était l’économie de services et que ces services se substituaient de manière équivalente à la production. La plupart des économistes ont rayé toute politique industrielle, expliquant que le gouvernement ne pouvait intervenir pour choisir les gagnants et que c’était au libre marché, avec ses investissements, de le faire.

Eh bien, 25 ans plus tard, la plupart de ces services sont des services financiers qui se sont révélés être une gigantesque bulle qui a maintenant explosé. Le libre marché a commis erreur sur erreur et depuis l’été 2007, le gouvernement intervient avec l’argent du contribuable pour choisir les gagnants, sauf que la plupart d’entre eux sont en réalité des banques en faillite.

Depuis Alexander Hamilton et son Rapport sur les manufactures jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale, puis au programme spatial lancé par John Fitzgerald Kennedy, notre histoire révèle que les Etats-Unis ont toujours eu une politique industrielle. (…) Toute cette politique de Hamilton à Kennedy ne fut qu’une seule et unique politique industrielle à grande échelle. (…)

Dans la situation économique actuelle, à moins de revenir à ces conceptions, je ne vois pas comment nous nous en sortirons. Ce n’est pas une simple question de politique bancaire ou financière. Il s’agit de ce que nous voulons faire pour notre pays et pour le monde.

LaRouche : C’est assez vrai : la dernière fois que les États-Unis ont réellement voulu sauver leur âme, c’était à la suite du discours de Kennedy, fixant pour objectif d’aller sur la Lune, non pas parce que c’était facile, mais justement parce que c’était difficile. A l’époque, notre économie n’allait pas très bien, notre programme spatial était à l’agonie et ce discours a tout changé. Malgré tout ce qui est arrivé entre ce moment-là et l’arrivée au pouvoir de ce fou de Nixon, l’aérospatiale fut le cœur des plus grandes avancées économiques que nous ayons jamais vues. (…)

L’importance des révolutions scientifiques

Les bons économistes ne croient pas vraiment en ce qu’on appelle de nos jours « économie ». Ils pensent en termes beaucoup plus concrets et n’utilisent l’expression « politique industrielle » que dans le sens où l’entendait Alexander Hamilton : infrastructure, agriculture et manufactures sont les catégories économiques de base. Tout le reste est subsidiaire.

La science est le moteur de ce processus, particulièrement la science physique. Cela comporte plusieurs aspects : le processus de découverte, le processus qui mène au processus de découverte et les retombées de ce processus, c’est-à-dire les effets d’une découverte qui rejaillissent tout au long du processus de production et d’ingénierie jusque dans l’économie de tous les jours. Il s’agit essentiellement de l’accroissement de la densité du flux énergétique dans la source d’énergie sur laquelle est basée l’ensemble de l’économie. Pour le comprendre, voyez l’évolution entre l’utilisation du charbon, du coke, du pétrole et du gaz naturel, puis de l’énergie nucléaire. Voyez les changements dans l’utilisation et les formes de la puissance électrique.

Par exemple, le développement des moteurs à courant alternatif à New York, au début du XXe siècle, constitua un changement majeur dans l’usage qui était fait de l’électricité, rendant possible la conception de machines plus petites et autonomes qui interviendraient dans des phases particulières de la production. Ces moteurs ont révolutionné la productivité américaine dans les années 1910, 1911, 1912.

Il y a différentes révolutions de ce genre dans la technologie, qui permettent des percées et rejaillissent sur tout le secteur industriel. Avant, les usines fonctionnaient avec de gros moteurs à vapeur alimentant plusieurs machines grâce à un système de courroies. Avec le moteur électrique à courant alternatif, les machines avait chacune un moteur, ce qui permit de révolutionner l’industrie de la machine-outil.

Il faut donc toujours chercher à provoquer des révolutions scientifiques dans la technologie, qu’elles soient minimes, comme le passage au courant alternatif, ou qu’elles soient beaucoup plus fondamentales. Mais pour cela il faut que l’humanité se donne une mission, en adoptant cette attitude : « Nous faisons ainsi depuis longtemps, ne serait-il pas temps de trouver une meilleure façon de le faire, de trouver quelque chose de nouveau ? » Tous les grands changements de l’histoire économique sont intervenus lorsqu’on s’est donné un projet, une mission nationale où l’on mobilise les gens autour d’enjeux technologiques. En faisant cela, vous vous rendez compte aussi qu’il y a des limites intrinsèques à chaque technologie, qui sont liées aux principes scientifiques sur lesquelles elles reposent.

Aller dans l’espace pour changer la Terre

Nous devons effectuer un grand changement. Le programme spatial en offrait l’occasion, mais après Nixon, nous sommes devenus incapables d’aller sur la Lune. Il a tué la Lune ! Plutôt que de nous donner la Lune, il nous a offert des clairs de Lune ! Nous avons tué notre programme spatial et aujourd’hui il ne ressemble plus à rien ; tout est désorganisé : il y a un laboratoire par ci, un autre truc par là. C’est à ce désastre que nous tentons de remédier avec notre équipe du « Basement » [2].

L’industrialisation de la Lune est le défi qui nous est posé ; c’est un projet qui a été conçu dans les années 1970 et 1980 par un de mes amis et qui est toujours faisable. Si vous voulez aller dans l’espace, il faut passer à un niveau technologique supérieur sur Terre. Mais pour accomplir ce saut technologique, il faut se mettre au défi de l’exploration spatiale, qui jouera un rôle moteur et profitera à l’économie terrestre et à toute l’humanité. (…)

Toute personne compétente en science et en économie sait que le défi est maintenant d’accomplir ce qui a été commencé sous Kennedy. Déjà à l’époque, l’objectif n’était pas seulement d’aller sur la Lune, mais aussi de l’industrialiser. Il s’agirait en grande partie d’industries automatiques contrôlées depuis la Terre par un nombre restreint de personnes, car la vie en faible pesanteur n’est pas ce qu’il y a de mieux pour la santé.

Ensuite, que ferons-nous avec tout cela ? Eh bien, nous irons sur Mars. Comment s’y rendre ? On peut toujours emprunter une trajectoire inertielle, mais je n’aimerais pas que l’on envoie ainsi un être humain pendant 200 ou 300 jours sans capacité de retour ni de secours.

Il faut donc s’orienter vers des vols accélérés. La Lune est très riche en hélium 3 que le soleil y a déposé depuis longtemps, et qui se révèlera très utile pour propulser des vaisseaux spatiaux. Avec la fusion de l’hélium 3, on pourrait obtenir une gravité de 1 tout le long du vol entre la Lune et Mars qui ne durerait que quelques jours ! Bien sûr il y a beaucoup de problèmes à prendre en considération pour arriver à cela, mais aller de la Lune à Mars en quelques jours et avec une gravité de 1G signifie que cette planète nous est ouverte ! Une fois cette politique adoptée, tout ce que nous ferons pour la réaliser rejaillira sur Terre et révolutionnera tout ce que nous faisons.

S’engager pour l’avenir de l’humanité

Au-delà de cette réorganisation planifiée de l’économie, nous devons susciter de l’intérêt pour ce projet. Il y a déjà dix pays dans le monde qui sont activement engagés dans un projet lunaire. Je défends un projet martien aujourd’hui comme hier ; certains se souviendront de ma campagne présidentielle de 1988 et de ce spot TV d’une demi-heure sur le projet d’exploration vers Mars. (…)

D’ici 20, 30 ou 40 ans, nous pourrions non seulement avoir réalisé le développement de la Lune mais aussi avoir mis un homme sur Mars. Nous changerons ainsi la conception que l’homme a de lui-même ; il ne s€e pensera plus comme un ver de terre mais se projettera dans le système solaire, ce qui implique un changement des relations entre êtres humains. Imaginez : une personne travaillant sur Mars et une autre sur Terre, avec un temps de trajet entre les deux d’un week-end.

La vie humaine va complètement changer. Les technologies utilisées là-haut se réverbéreront sur l’économie terrestre. Pensez, par exemple, aux effets qu’aura la culture de légumes sur Mars sur notre conception de l’agriculture.

Ces changements ne peuvent avoir lieu que si l’on adopte une mission nationale. Avant tout, notre première mission est de mettre le nigaud de la Maison Blanche sous contrôle. (…)

Nous devons penser deux à trois générations à l’avance. Ne pensez-vous pas à ce que feront vos petits-enfants et vos arrière-petits-enfants ? N’est-ce pas le sens de votre vie ? Une génération représente 25 années, trois générations 75 ans et quatre générations un siècle : qu’allons-nous faire ces 100 prochaines années ?

Si vous vous souciez de ceux qui viendront après vous et que vous vous identifiez à l’avenir de l’humanité, vous vous demandez alors naturellement ce que vous allez faire pour rendre leur vie possible. Vous pensez à où nous en serons dans 75 ans et comment faire en sorte que cela arrive ; aux choix que nous devons faire maintenant pour y arriver. Que ferez-vous de votre retraite ? Que ferez-vous lorsque vous aurez 75 ou même 85 ans et que vous serez bien portant grâce aux progrès de la médecine ? Quel est votre avenir ? Quel monde voulez-vous ? A quoi voulez-vous que le système solaire ressemble ? (…)

Il ne s’agit pas de choisir telle ou telle politique pour l’emploi, pour les salaires, etc. mais de se donner une mission pour l’humanité qui nous rappelle ce qui nous différencie des animaux. Qu’est-ce qui peut certifier que nous sommes humains et ne pas nous rendre honteux aux yeux de nos petits-enfants ?

Seule cette motivation permettra d’aller plus loin. Quel but donner à sa vie ? A quoi bon élever ses enfants ? Pourquoi les générations futures devraient-elles se souvenir de nous ? Qu’allez-vous faire pour mériter ce respect ? Quelle est votre identité en tant qu’être humain ? En suivant cette ligne de pensée et avec le paradigme nouveau de l’exploration spatiale, alors on ne pense plus en termes de politique industrielle ou de politique agricole, mais de politique humaine : de progrès et de développement de l’espèce humaine pour que les générations futures aient une vie meilleure. Et cela nécessite un progrès non seulement scientifique et technologique, mais aussi culturel afin de stimuler la créativité de l’esprit humain. Voilà notre mission. (…) Si nous décidons de prendre ce chemin, de nous donner cette mission, alors nous réaliserons toutes les étapes scientifiques et technologiques qui nous permettront d’y arriver. (…)

Quoi qu’il arrive, c’est ainsi qu’il convient de définir une perspective, pas en parlant des aspects techniques d’une politique industrielle. Si vous ne parvenez pas à susciter chez les gens l’imagination et la passion pour accomplir un projet d’avenir, vous ne pouvez avoir d’avenir.


[1Le « Stanford group » est un groupe multidisciplinaire rattaché aux universités de Stanford, Berkeley et Princeton, et qui avait été chargé après l’élection d’Obama d’élaborer une politique économique alternative. Depuis la volte-face de la Maison Blanche après l’investiture d’Obama, ce groupe poursuit un dialogue étroit avec Lyndon LaRouche (cf. discussions lors des conférences internet de LaRouche depuis avril).

[2La « Basement team » est un projet scientifique et économique lancé en 2006 par Lyndon LaRouche et son mouvement de jeunes aux États-Unis. Fondé sur l’étude et la redécouverte des révolutions successives dans l’histoire de la pensée scientifique (Kepler, Fermat, Pascal, Leibniz, Gauss, Riemann, Einstein et d’autres), ce projet vise à créer une nouvelle révolution dans la méthode scientifique au moment où l’économie mondiale sombre.