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Des milliards pour produire la nourriture, pas pour les armes en Ukraine

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Pas d’argent pour les hôpitaux publics, par d’argent pour les infrastructures, pas d’argent pour la nourriture, rabâchent les ultra-libéraux atlantistes. En revanche, l’argent coule à flots lorsqu’il s’agit de livrer des armes en Ukraine...

SI—Un conflit majeur est désormais ouvert entre nations et dirigeants soutenant les mesures destinées à mettre fin au conflit en Ukraine et à produire davantage de nourriture pour éviter la famine, et les intérêts financiers et politiques, centrés sur la région transatlantique, qui imposent ce qu’ils appellent « l’ordre fondé sur des règles » et sa cohorte de sanctions, qui veulent davantage d’armes pour l’Ukraine et qui se moquent éperdument de savoir si cela empêche le règlement du conflit ou crée une famine désespérée. Nous sommes confrontés au risque d’une guerre nucléaire.

Alors, quels sont ceux qui se battent pour en faveur de la satisfaction des besoins alimentaires ? La liste, informelle, va de l’Inde à l’Argentine, en passant par les nations d’Afrique, ainsi que la Russie et la Chine. Elle inclut tous les agriculteurs d’Europe, des États-Unis et d’Inde, qui protestent depuis des années, juste pour avoir le droit de continuer à produire de la nourriture. Et l’Institut Schiller, qui a mené le combat sur cette question, en fait partie.

Parmi ceux qui s’opposent aux mesures économiques nécessaires pour produire plus de nourriture, on trouve le gouvernement américain, la Commission européenne, le G7 et les réseaux financiers du FMI, de la Banque mondiale, de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et d’autres, qui se cachent notamment derrière les règles du « libre-échange », les limites « vertes » et les préoccupations relatives aux « droits de l’homme » non alimentaires. Aujourd’hui, 1,7 milliard de personnes se dirigent vers la famine, prévient le secrétaire général des Nations unies, António Guterres.

L’Inde a mis la question à l’ordre du jour mondial le 22 avril à Washington, D.C. Une conférence de presse conjointe a été organisée par deux hauts représentants indiens, la ministre des finances Nirmala Sitharaman et l’ambassadeur indien aux États-Unis Taranjit Singh Sandhu, à la fin du sommet annuel de printemps du FMI et de la Banque mondiale. Mme Sitharaman a indiqué qu’elle avait déclaré aux responsables du sommet que « des pays comme l’Inde, qui ont un potentiel d’exportation de la production agricole, notamment des céréales, ont rencontré des difficultés avec l’OMC. »

Les « difficultés » auxquelles elle a poliment fait référence comprennent la subversion, par les règles de l’OMC, du droit souverain des gouvernements à soutenir leurs agriculteurs, à maintenir des réserves alimentaires, à exporter et même à tenter d’atteindre l’autosuffisance alimentaire. Depuis sa création en 1995, l’OMC rationalise la suppression de l’approvisionnement alimentaire des nations, en déclarant que la sécurité alimentaire ne vient que de « l’accès aux marchés mondiaux », et non du développement du secteur agricole de votre propre pays. Selon les règles de l’OMC, l’Inde soutient ses agriculteurs à hauteur de plus de 10 % de leurs coûts. L’Inde ne peut donc pas être autorisée à exporter du blé et du riz, sinon elle viole les droits des agriculteurs américains, européens et autres à vendre des céréales !

Mobilisation des agriculteurs

Il faut urgemment arrêter cette tyrannie criminelle et soutenir les agriculteurs partout dans le monde, pour que la nourriture parvienne à tous ceux qui en ont besoin, de l’Afghanistan au Yémen, en passant par l’Afrique et Haïti.

Il faut tout d’abord, mettre en œuvre des mesures d’urgence, coordonnées par les dirigeants des principales nations productrices, afin de fournir des engrais, du carburant, des semences, des produits chimiques, des machines pour soutenir les agriculteurs au maximum dans des endroits ciblés qui peuvent produire la récolte la plus exportable dans les plus brefs délais, comme l’Inde. Pour le blé, par exemple, cela signifie maintenir et augmenter les 200 millions de tonnes métriques (mmt) exportées chaque année. Le doubler dès que possible. Compenser la perte de 19 millions de tonnes métriques d’exportations annuelles de blé en provenance d’Ukraine, et reconstruire dès que possible. Faire de même pour le riz, les huiles, les haricots et tous les autres produits de base.

Deuxièmement, il faut lancer l’infrastructure nécessaire pour soutenir l’agriculture moderne partout - eau, électricité, transport, science des cultures, capacité agro-industrielle et transformation des aliments. Oui, cela signifie qu’il faut remplacer le système monétariste actuel obsolète et gangrené par la spéculation, les sauvetages financiers et les décennies d’absence d’investissements productifs.

L’objectif est de doubler la production alimentaire mondiale dès que possible, pour atteindre plus de 4 milliards de tonnes de céréales (tous types confondus), contre 2,7 milliards de tonnes actuellement. Plus de 800 millions de personnes étaient en situation d’insécurité alimentaire avant la pandémie et l’hyperinflation. Aujourd’hui, un milliard de personnes pourraient mourir de faim dans l’année à venir, sans notre intervention.

Des alliés pour la production

Le Premier ministre indien Narendra Modi a déclaré au président Joe Biden au début du mois que l’Inde disposait de céréales pour aider à combler le déficit mondial en blé, aggravé par la crise ukrainienne et les sanctions, si l’OMC lève ses restrictions. En Argentine, le ministre des affaires étrangères Santiago Cafiero a clairement indiqué le 23 avril que son pays fera tout son possible pour lutter contre la faim, mais qu’il ne se joindra pas aux sanctions contre la Russie. L’Argentine considère la sécurité alimentaire comme un sujet clé à discuter lors du Sommet des Amériques qui se tiendra en juin à Los Angeles, en Californie. La Russie fournit des engrais à l’Inde, au Brésil et à d’autres nations.

Ces engagements pour lutter contre la crise alimentaire ne sont qu’une partie du réalignement mondial en cours, essentiel pour vaincre l’assaut de l’OTAN mondial pour la guerre et la famine. L’Occident déverse des armes en Ukraine, s’opposant à toute négociation diplomatique pour une résolution. L’Occident exige que nous accusions la Russie de la faim, tout en empêchant toute augmentation de la production alimentaire pour mettre fin à la famine. C’est insensé.

Il est grand temps de rejoindre l’initiative de l’Institut Schiller en tant que forum politique pour la convocation d’une conférence internationale afin de mettre en place une nouvelle politique de sécurité et de développement.

Votre message : ecrivez@institutschiller.ca