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Couloir international de transport Nord-Sud, dé-dollarisation et NBW

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Karel Vereycken

C’est parti ! Le 12 juin 2022, le départ d’une modeste cargaison de deux conteneurs de contreplaqué russe au départ de Saint-Pétersbourg en Russie à destination de Bombay en Inde, marque l’ouverture d’un nouvel axe de transport nommé Corridor international de transport Nord-Sud (International North–South Transport Corridor – INSTC).

Loin d’un projet « anti-occidental » ou « alternatif » au projet chinois des Nouvelles Routes de la soie, l’INSTC incarne donc l’embryon d’un nouveau paradigme et d’un nouveau système financier international dont il est si urgent de discuter lors d’une nouvelle conférence de type Bretton Woods que nos dirigeants devraient être sommés de convoquer de toute urgence. (merci de signer l’appel de l’Institut Schiller dans ce sens)

Le nouveau corridor de transport INSTC est en réalité un réseau multimodal (rail, mer, route, mer), long de 7200 km, reliant la mer Baltique à la mer d’Arabie.

  • Du nord, les marchandises russes et biélorusses seront acheminées par chemin de fer, en passant par Moscou, jusqu’à la ville russe d’Astrakhan, carrefour historique des anciennes Routes de la soie, peuplée de 530 000 habitants et située à 1276 km de Moscou près de l’embouchure de la Volga sur la mer Caspienne ;
  • Partant de Solyanka, le port d’Astrakhan, les marchandises traverseront ensuite la mer Caspienne par navire pour être réceptionnés au port iranien d’Anzali, ville de 11 400 habitants également située sur la mer Caspienne à 360 km au nord de Téhéran ;
  • Les marchandises traverseront ensuite l’Iran du nord au sud, en passant par la capitale iranienne, carrefour où leur itinéraire croise les réseaux ferrés de la Route de la soie reliant la Chine à la Turquie ;
  • Enfin, dernière étape, à partir du port iranien Bandar Abbas sur le golfe Persique, les marchandises partiront de nouveau par voie maritime vers Nhava Sheva, le grand port en face de Bombay, en Inde. Le tout organisé par l’Iran Shipping Lines (IRISL), une entreprise sous sanctions américaines...

Historique

De l’idée à sa réalisation, l’INSTC a parcouru un long chemin :

2000
C’est le 12 septembre 2000 que Russie, Inde et Iran signent un accord intergouvernemental en vue de réaliser le projet d’INSTC.

2005
Prenant conscience de la pertinence du projet et des retombés potentielles au niveau régional, l’Azerbaïdjan se joint au projet en 2005, suivi par d’autres pays (Biélorussie, Bulgarie, Arménie, Kazakhstan, Kirghizistan, Oman, Tadjikistan, Turquie, Ukraine).

2020
Un protocole d’accord pour le transport de marchandises est signé en mars 2020 entre la société d’État indienne Container Corporation of India (Concor) et la société contrôlée in fine par la Fédération de Russie, Russian Railways Logistics Joint Stock Company (RZD).

2022
C’est suite au conflit en Ukraine et aux sanctions occidentales que le projet se trouve accéléré : la Russie réorientant ses exportations vers l’Asie, et des pays comme l’Inde, très dépendant d’importations d’hydrocarbures, refusant d’être pris en otage par la « logique » des blocs.

Comme le note Paco Martin dans son article posté sur le site du Portail d’Intelligence Économique,

" En plus d’avoir refusé de condamner la Russie à la suite de l’invasion de l’Ukraine, le gouvernement du Premier ministre indien Narendra Modi semble avoir accéléré sa coopération avec Moscou, aussi bien militaire qu’énergétique. La Russie a vendu pour 5,5 milliards de dollars de systèmes de missiles S-400, et est devenue le deuxième fournisseur d’armes de l’Inde, représentant 35 % des exportations russes. Depuis mars 2022, les exportations de pétrole et de gaz russes ont très largement augmenté en Inde, presque 30 millions de barils de pétrole ont été vendus en juin 2022, et la Russie se classe comme deuxième exportateur de gaz en Inde derrière l’Irak, alors qu’elle était à la neuvième place en 2021. Ces achats de ressources sont largement dus à la baisse du prix des énergies fossiles extraites en Russie à la suite des sanctions occidentales. Il est à noter que l’Inde est le troisième consommateur mondial de pétrole et 80 % de celui-ci est importé. "

D’ailleurs, selon une étude du National Bureau of Asian Research, la demande électrique en Inde devrait augmenter de 5 % tous les ans. Le pays était aussi dépendant à 85 % des importations de pétrole en 2020 et à 54,3 % pour ses importations de gaz. Une demande à laquelle l’Asie centrale, la Russie et l’Iran pourraient répondre avec leurs importantes ressources naturelles.

Enfin, à la veille d’une potentielle crise alimentaire mondiale, ce corridor pourrait offrir l’opportunité à la Russie d’honorer ses contrats de fourniture de blé au monde entier, à travers l’Iran.

Dans l’article de Silk Road Briefing du 24/05/2022, Mohammad Reza Mortazavi, le chef des associations des industries alimentaires iraniennes, avait annoncé que l’Iran pourrait « faire transiter du blé de la Russie vers d’autres pays et les entreprises iraniennes pourraient dominer le commerce » ; « l’Iran, la Russie et le Kazakhstan pourraient troquer du blé et des céréales avec d’autres produits tels que des légumes, des fruits et des produits laitiers. »

Pour l’Iran, le projet offre également des avantages intéressants. Dans le cadre des sanctions occidentales contre l’Iran et sa situation économique, le pays peut retrouver son statut de grand carrefour commercial entre la Russie et l’Inde, y compris en profitant des taxes prélevées sur les transits.

Infrastructures

Le lancement du projet ne peut que susciter des investissements dans les infrastructures. Le 10 juin, une semaine après l’annonce du départ du premier convoi, le ministre des Affaires étrangères Hossein Amir Abdollahian a déclaré que l’Iran et l’Inde ont convenu d’augmenter les investissements dans le port de Chabahar, le premier port iranien en eau profonde à l’embouchure du golfe d’Oman, afin de compléter les capacités de Bandar Abbas qui gère actuellement 85 % des transports maritimes iraniens mais ne peut pas recevoir des bateaux de plus de 100 000 tonnes. A cela s’ajoute qu’en cas de verrouillage du détroit d’Ormuz, l’Iran, grâce au port de Chabahar, gardera un accès à l’océan Indien.

Et comme le souligne Paco Martin, l’INSTC contribuera au désenclavement des pays d’Asie centrale.

  • Par exemple, cela offre à l’Afghanistan une deuxième voie pour accéder à la mer, autre que le Pakistan. C’est dans ce cadre que de nombreux projets d’infrastructures en partie financés par Téhéran ont fleuri. Par exemple : le tronçon kirghize du projet routier Iran-Afghanistan-Tadjikistan-Kirghizistan-Chine et le tunnel d’Anzob au Tadjikistan.
  • Autre exemple de développement d’infrastructure iranienne : le port d’Astara au sud-ouest de la mer Caspienne qui a été inauguré en mars 2013 et intégré à l’INSTC afin d’améliorer la connectivité maritime de l’Iran. Un port qui a été relié par un chemin de fer au port de Shahid Rajaee, faisant partie du complexe de Bandar Abbas, en juin 2021. Ainsi, via ce chemin de fer, l’Asie centrale enclavée obtient une liaison ferroviaire plus courte vers le golfe Persique, confortant la nouvelle place de ce port comme « plaque tournante maritime dans la région de la Caspienne ».

L’Inde tire également son épingle du jeu. Pour elle, c’est une occasion d’accroître ses échanges avec l’Iran et l’Afghanistan via le port de Chabahar, mais aussi in fine avec le reste de l’Asie centrale. Jusqu’ici, le Pakistan refuse aux marchandises indiennes l’accès terrestre à l’Afghanistan, impactant fortement les capacités commerciales indiennes.

De plus, le corridor pourrait faciliter l’approvisionnement en blé de l’immense population de l’Inde, permettant à celle-ci d’avoir une option supplémentaire pour subvenir partiellement à ses besoins. Malgré son statut de deuxième producteur mondial de blé, les problèmes persistent au point que Narendra Modi a fini par suspendre depuis le 14 mai les exportations de blé indiennes. Avec 1,4 milliards d’Indiens à nourrir, l’accès aux fournitures russes accroît la sécurité.

La proposition iranienne

Enfin, vu qu’il s’agit d’un « complot » entre pays « autocratiques » et sous sanction, c’est autour de ces échanges vitaux d’énergie et de nourriture qu’un nouveau type de système financier se met graduellement en place.

Le 1er juin, Mehdi Safari, ministre iranien de la diplomatie économique, a déclaré que la République islamique a proposé que l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), dont l’Iran est devenu membre, introduise une nouvelle monnaie unique pour les échanges commerciaux de ses États membres.

La proposition a été envoyée sous forme de lettre à l’Organisation de coopération de Shanghai deux mois avant l’annonce. M. Safari a ajouté que son pays assurerait un suivi et a exprimé l’espoir que la proposition soit approuvée par l’organisation. Le 21 septembre dernier, la candidature de l’Iran pour devenir membre à part entière de l’Organisation de coopération de Shanghai a été approuvée à l’unanimité par les sept membres permanents du bloc. Aujourd’hui, avec l’Indonésie et l’Argentine, l’Iran a demandé à devenir membre des BRICS.

En effet, le 30 janvier 2022, Hamid Reza Maghsoudi, membre du corps enseignant de l’Université de Qom, avait précisé dans une interview avec l’Agence iranienne de presse coranique (IQNA), à propos de la formation d’une monnaie commune entre les pays islamiques :

Les pays arabes du Golfe persique ont un système monétaire lié au système monétaire du dollar. Certains pays islamiques, comme les pays africains et certains pays d’Asie centrale, n’ont pas de système monétaire spécifique et leur système monétaire est basé sur les devises d’un pays européen. Comment ces pays qui ne disposent pas d’un système de prise de décision indépendant dans le domaine monétaire et bancaire, pourraient-ils participer à la formation d’une monnaie islamique unique ? D’autre part, étant donné que les pays arabes ont lié leurs économies au dollar et profitent de nombreux avantages du dollar, il est peu probable qu’ils veuillent quitter leur système monétaire actuel, du moins à court terme.

"Les pays qui souhaitent former une monnaie unique doivent avoir certaines affinités ou du moins, une autorité politique qui les oblige à accepter le système monétaire de l’autre. Une unité monétaire islamique commune peut être formée entre l’Iran, l’Afghanistan, la Syrie, le Yémen et même certains pays d’Amérique du Sud comme le Venezuela, car l’Iran jouit d’une autorité politique. Avec la Turquie, la Malaisie et l’Indonésie, qui ne sont pas en conflit sérieux avec nous, et ne sont pas dominées par le dollar américain, un pacte monétaire bilatéral et multilatéral peut être conclu, mais pour le moment, nous ne devrions pas penser à créer une devise islamique commune.

La Banque islamique de développement n’a pas de pouvoir politique et n’a donc pas de valeur économique particulière. Bien sûr, différents pays islamiques sont actionnaires de cette banque, mais ce n’est qu’un fonds commun qui si un problème survient pour un pays, peut combler les trous, mais en raison de conflits politiques entre les pays membres, la Banque islamique de développement n’a pas pu travailler de façon correcte.

La République islamique d’Iran possède une quantité importante de monnaies numériques, dont la valeur fluctue constamment selon des gens comme Elon Musk. C’est donc une grave erreur de penser que les super-capitalistes américains sont séparés du gouvernement américain, et le prix de ces devises augmentera ou diminuera quand ces super-investisseurs le voudront. Un autre point est de savoir si nous pouvons avoir une monnaie numérique commune. En réponse à cette question, il faut dire que tant que les monnaies numériques ne sont pas sous le contrôle des pays islamiques, la création de ces devises est une erreur. Si une monnaie numérique est créée dans cette situation, elle est basée sur les intérêts des pays qui l’ont créée et contrôlée. A mon avis, il est inutile de former une monnaie numérique commune entre les pays musulmans, tant qu’il n’y aura pas une force majeure capable de protéger les intérêts des musulmans et sa juste répartition."

Tout cela explore les contours d’un système nouveau. Cependant, et c’est est ici que nous mettons nos amis des BRICS et d’ailleurs en garde, car si ce qui se dit dans les média se confirme, le « modèle » pour cette « monnaie unique » serait l’euro, ce qui serait totalement suicidaire pour des raisons que le mouvement LaRouche (ainsi que celui de Jacques Cheminade en France), depuis quarante ans la principale force politique dans le monde proposant un nouveau système financier international, ont documenté depuis la création de cette « fausse monnaie » (car dépourvue d’État).

Si cette erreur est évitée, « une unité comptable » partagée, basée sur un panier de devises et de matières premières, peut bien sûr devenir très utile et unir une variété de monnaies souveraines arrimées les unes aux autres dans le cadre d’une perspective de développement économique commune gagnant-gagnant.

La Russie et la dédollarisation

Pour sa part, le président russe Vladimir Poutine, a annoncé lors du forum économique des BRICS qui s’est déroulé à Pékin le 22 juin, soit 10 jours après l’inauguration de l’INSTC, que « La question de la création d’une monnaie de réserve internationale basée sur un panier de devises de nos pays est à l’étude (…) Nous sommes prêts à coopérer ouvertement avec tous les partenaires honnêtes. »

La rapidité avec laquelle les États-Unis et leurs alliés ont imposé des sanctions sur les réserves de change russes fin février et début mars (gel d’environ la moitié des réserves monétaires de la Banque de Russie (soit 300 milliards d’équivalent dollars et euros) a choqué les autorités russes. Pour sa part, la Chine a également remarqué la rapidité et la furtivité des actions du Trésor américain dans la localisation et le gel des avoirs monétaires de l’État russe.

Dans un premier temps, il pourrait s’agir d’un système facilitant les paiements. Moscou veut développer et mettre en œuvre au sein des BRICS un système de messagerie et de paiements internationaux alternatif à SWIFT, système contrôlé par les États occidentaux. La Russie souhaite connecter son propre système, SPFS, au réseau des BRICS.

Poutine déclara en ce sens le 22 juin qu’avec les partenaires des BRICS, « des mécanismes alternatifs fiables pour les paiements internationaux sont en cours de développement. (…) Le système russe de transmission des messages financiers est ouvert pour connecter les banques des cinq pays. La géographie de l’utilisation du système de paiement russe Mir est en expansion. »

Dans un deuxième temps, une « monnaie alternative commune » basée sur un panier de devises des pays membres du groupe BRICS est envisagée.

Le 27 juin, Nikita Kondratyev, directeur adjoint du Département de la coopération économique multilatérale, a précisé que

"Sans une augmentation de la part des règlements en monnaies nationales, sans une certaine part de dédollarisation, qui a maintenant lieu dans le cadre des BRICS, sans mécanismes financiers, le pool de réserves monétaires contingentes des BRICS, qui existe maintenant et est testé en tenant compte des paniers de monnaies nationales, il ne sera pas possible de parvenir à la création d’une monnaie alternative commune."

Or, c’est précisément ce qui a lieu et qui va s’accélérer, notamment avec l’INSTC. Si aujourd’hui, la part des règlements commerciaux dans les monnaies nationales des pays BRICS est de 38 %, ce chiffre ne dépassait pas 3 % en 2013-2014. Dans un avenir proche, il est prévu de l’augmenter à 50 %, y compris par le biais du commerce de produits agricoles et de biens de consommation.

Dans un article intitulé Partnership of Russia, Iran And Turkey- Foundation Of A New World Order Has Begun (Partenariat Russie, Iran et Turquie, la fondation d’un nouvel ordre mondial a commencé), le site India.com note le 21 juillet rappelle que

"Depuis que les Etats-Unis ont lancé le concept du ’pétro-dollar’, ils ont fait du dollar américain la monnaie étrangère la plus importante du monde. Dans le monde entier, les pays ne se contentent pas de faire du commerce en dollars américains, mais conservent également d’importants dépôts de dollars américains dans leurs réserves de change. Actuellement, les États-Unis ont plus de 2,5 trillions de dollars en circulation sous forme de billets de banque et plus de 25 trillions de dollars en circulation sous forme d’obligations, de bons du Trésor et d’autres instruments. C’est beaucoup plus que leur PIB total et presque 55 fois plus que l’ensemble des réserves d’or des États-Unis."

Le 26 juillet, le ministre iranien des affaires économiques et financières, Ehsan Khandouzi, a annoncé que l’Iran et la Russie allaient officiellement commencer à échanger des rials et des roubles, abandonnant le dollar américain comme monnaie commune.

Selon l’agence de presse russe Sputnik, le gouverneur de la banque centrale iranienne, Ali Saleh Abadi, a souligné que « le lancement des échanges sur la paire de devises rouble/rial iranien est une étape importante dans le développement des relations économiques entre l’Iran et la Russie. »

Les Indiens paient les Russes en yuan

La Russie, on le sait, impose d’être payée en rouble par les pays qui lui sont hostiles, et en certaines devises nationales par les pays amicaux. Les entreprises chinoises utilisent le yuan dans les règlements commerciaux avec la Russie depuis des années.

Le 29 juin, précise Reuters, le plus grand producteur de ciment de l’Inde, UltraTech Cement, a importé une cargaison de charbon russe et payé en yuan chinois. Du jamais vu.

Alors que nos géopoliticiens nous font des cours sur les rivalités entre l’Inde et la Chine, il s’avère que pour les règlements commerciaux indiens utilisant le yuan, les créanciers indiens envoient des dollars à des succursales en Chine ou à Hong Kong, ou à des banques chinoises avec lesquelles ils ont des liens, en échange de yuan pour régler le commerce. « Si la voie roupie-yuan-rouble s’avère favorable, les entreprises ont toutes les raisons et les incitations pour passer à cette voie. Cela devrait se produire davantage », a déclaré Subash Chandra Garg, ancien secrétaire aux Affaires économiques au ministère indien des Finances.

En réalité, tout au long de la Route de la soie maritime, marchands chinois, indiens, perses et arabes se côtoient depuis des millénaires. Ils se font la concurrence mais savent également se rendre des services en temps utile.

Vers un Nouveau Bretton Woods

Les États-Unis, et une partie du monde transatlantique, « découvrent » et « s’étonnent », qu’à force de sanctions, de confiscation d’avoirs de pays « inamicaux » et de menaces militaires, un nombre croissant de pays, y compris leurs propres alliés, entament une « dédollarisation » de leurs échanges et économies. Contrairement aux moutons de Panurge européens, ces pays ont bien compris qu’il ne s’agit plus d’une devise américaine, mais d’un « dollar » transformé en outil de domination au service, non plus d’un peuple américain en voie de déclassement, mais d’une oligarchie financière hors-sol, apatride et prédatrice.

Loin d’un projet « anti-occidental » ou « alternatif » au projet chinois des Nouvelles Routes de la soie, l’INSTC incarne donc l’embryon d’un nouveau paradigme et d’un nouveau système financier international dont il est si urgent de discuter lors d’une nouvelle conférence de type Bretton Woods (merci de signer l’appel de l’Institut Schiller dans ce sens) que nos dirigeants devraient être sommés de convoquer de toute urgence.

Une telle conférence, si chacun laisse ses jeux politiques et sa cupidité au vestiaire, pourrait permettre au monde entier, y compris aux États-Unis, de repartir sur des nouvelles bases grâce à des coopérations gagnant-gagnant au service d’un avenir partagé par tous.

Ce qui manque pour y arriver, c’est précisément cet état d’esprit et du cœur dont parlait le président Abraham Lincoln en 1865. Anticipant la fin de la guerre de Sécession, ce géant politique exhortait chaque Américain d’agir « With malice toward none ; with charity for all » (avec malice envers personne ; avec charité envers tous).