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Flop27 : les BRICS et les pays du Sud rejettent le « Green Deal » malthusien

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S&P—La COP27, qui s’est terminée le 20 novembre Charm el-Cheikh, en Égypte, peut être qualifiée de « FLOP27 », du moins selon les critères occidentaux. En effet, malgré une déclaration commune tentant de sauver les apparences, la réalité est que ce sont les pays de l’hémisphère sud qui ont fixé le tempo, tout en dénonçant l’hypocrisie verte des Occidentaux. Comme l’a bien résumé un porte-parole africain : « Ils boivent du vin et nous disent de boire de l’eau ».

Côté occidental, c’est la consternation : « Rien sur la réduction progressive du charbon, aucun engagement clair à éliminer progressivement tous les combustibles fossiles », s’est lamenté le député conservateur britannique Alok Sharma, le président de la session de Glasgow de la COP26 de l’année dernière, au lendemain de la publication de la déclaration commune de la COP27.

Au lieu de cela, la conférence a ratifié la création d’un fonds international visant à aider les pays les plus pauvres à couvrir les « pertes et dommages » et à s’adapter au changement climatique — « adaptation » qui pourrait éventuellement signifier la construction d’un barrage en zone inondable… C’est le résultat de l’impulsion des cinq pays des BRICS, dont les ministres responsables du climat ont publié le 15 novembre, à quelques jours de la fin de la conférence, une déclaration commune défendant l’idée de ce fonds d’aide.

A Londres, Washington et Bruxelles, où l’on espère utiliser la bonne morale environnementale pour justifier un « ordre mondial basé sur des règles » incapable d’engendrer autre chose que la pauvreté et la famine, l’on a bien tenté de s’opposer à cette volonté du « Sud global ». Mais, face aux pressions massives des pays du Sud, les États-Unis ont fini par céder et accepter le concept du fonds « Pertes et dommages ». Non sans nourrir l’arrière-pensée de retourner la situation en utilisant ces fonds contre les Nouvelles Routes de la soie de la Chine.

Comme l’a rapporté Bloomberg Green, créée en 2020 par Bloomberg Media pour propager la bonne parole sur le réchauffement climatique, « la volonté de faire en sorte que les nations acceptent de plafonner les émissions mondiales d’ici 2025 ou de réduire progressivement tous les combustibles fossiles sans relâche (…) est tombée à plat » lors de la COP27 de Charm el-Cheikh. Un aveu révélateur, quand on sait que le fondateur de Bloomberg Media est le milliardaire Michael Bloomberg, monsieur « No Coal », envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour l’ambition et les solutions climatiques...

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Dans le même ordre d’idées, le responsable du climat et du Green Deal de l’Union européenne, Frans Timmermans, premier vice-président de la Commission européenne, a admis que les ambitions de la COP27 ont été revues à la baisse dans le texte final. « Nous étions confrontés à un dilemme moral. Nous avons dû renoncer à certaines des choses », a-t-il déclaré.

En effet, le texte final de la déclaration de la COP27 permet même une transition vers des sources « à faibles émissions », en référence à l’utilisation du gaz naturel. « Les principaux producteurs d’hydrocarbures tels que l’Arabie saoudite ont bloqué la possibilité de mettre en œuvre un plan d’élimination progressive du pétrole et du gaz », déplore Bloomberg Green.

« L’influence de l’industrie des combustibles fossiles a été constatée dans tous les domaines », a déclaré quant à elle Laurence Tubiana, la directrice de la Fondation européenne pour le climat et architecte de l’Accord de Paris de 2015. « La présidence égyptienne a produit un texte qui protège clairement les pétro-États pétroliers et gaziers et les industries des combustibles fossiles. Cette tendance ne peut pas se poursuivre aux Émirats arabes unis l’année prochaine  », faisant référence au président de la COP28, qui accueillera le sommet de la CCNUCC aux Émirats arabes unis.

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« Les pays du Sud ont gagné, mais qu’en est-il du climat ? », déplore l’Atlantic Council, le think tank de Washington, qui compte tout le gratin des néo-conservateurs anglo-américains pétris de bonne conscience environnementale et farcis d’impérialisme malthusien. Cette COP27 est un « échec total », écrit l’un de ses experts, « dévastateur pour les plans visant à maintenir le réchauffement climatique à pas plus de 1,5 ° Celsius ». « Les grands émetteurs – la Chine, l’Inde, le Brésil et l’Indonésie – se sont tirés d’affaire », écrit un autre.

Quoi qu’il en soit, cet épisode de la COP27 représente un signe supplémentaire des mouvements de plaques tectoniques qui secouent actuellement l’ordre mondial, et dans lesquels le centre de gravité géostratégique se déplace inexorablement de l’Ouest vers l’Est. En témoignent les propos du président ougandais Yoweri Museveni, en plein milieu de la conférence, qui s’est attaqué à l’hypocrisie occidentale, dénonçant la « faillite morale » de l’Europe, qui « utilise les combustibles fossiles de l’Afrique pour sa propre production d’énergie » tout en refusant « l’utilisation par l’Afrique de ces mêmes combustibles pour la sienne ».