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News / Brèves

EINSTEIN ET BEETHOVEN : PLAIDOYERS POUR LA PAIX

16 décembre 2020

Editorials/ Les éditoriaux de Gilles Gervais

Deux des esprits les plus créateurs du XXe siècle, le scientifique Albert Einstein et le musicien Wilhelm Furtwängler, écrivaient dans les années 50 :

« Seule la suppression définitive du risque universel de la guerre donne un sens et une chance à la survie du monde… ». (A. Einstein)

« L’humanité qui ne sait plus reconnaître les verdicts de l’esprit est mûre pour accepter le terrorisme d’un régime autoritaire… ». (W. Furtwängler) ]

Le 5 janvier 2012

Maurice Solovine, grand ami d’Albert Einstein publie en 1978 un recueil d’articles et de textes scientifiques de l’illustre savant, ainsi que la correspondance qu’il avait entretenu avec lui. Dans ce recueil intitulé « Comment je vois le monde », s’y trouve un court texte où Einstein explique pourquoi il a signé, [1] le 2 août 1939, cette fameuse lettre adressée au Président Franklin D. Roosevelt qui influencera la décision de son administration à initier le Projet Manhattan.

Confiant à ses proches qu’il avait souffert toute sa vie d’avoir accepté de signer cette lettre [2], Albert Einstein écrit dans les années 50 :

« Ma responsabilité dans la question de la bombe atomique se traduit par une seule intervention : j’ai écrit une lettre au Président Roosevelt. Je savais nécessaire et urgente l’organisation d’expériences de grande envergure pour l’étude et la réalisation de la bombe atomique. Je l’ai dit. Je savais aussi le risque universel causé par la découverte de la bombe. Mais les savants allemands s’acharnaient sur le même problème et avaient toutes les chances de le résoudre. J’ai donc pris mes responsabilités. Et pourtant je suis passionnément un pacifiste et je ne vois pas d’un œil différent la tuerie en temps de guerre et le crime en temps de paix. Puisque les nations ne se résolvent pas à supprimer la guerre par une action commune, puisqu’elles ne surmontent pas les conflits par un arbitrage pacifique et puisqu’elles ne fondent pas leur droit sur la loi, elles se contraignent inexorablement à préparer la guerre. Participant alors à la course générale aux armements et ne voulant pas perdre, elles conçoivent et exécutent les plans les plus détestables. Elles se précipitent vers la guerre. Mais aujourd’hui la guerre s’appelle l’anéantissement de l’humanité.

« Alors protester aujourd’hui contre les armements ne signifie rien et ne change rien. Seule la suppression définitive du risque universel de la guerre donne un sens et une chance à la survie du monde. Voilà désormais notre labeur quotidien et notre inébranlable décision : lutter contre la racine du mal et non contre les effets. L’homme accepte lucidement cette exigence. Qu’importe qu’on le taxe d’asocial ou d’utopique ?

« Gandhi incarne le plus grand génie politique de notre civilisation. Il a défini le sens concret d’une politique et sut dégager en tout homme un inépuisable héroïsme quand il découvre un but et une valeur à son action. L’Inde, aujourd’hui libre, prouve la justesse de son témoignage. Or la puissance matérielle en apparence invincible de l’Empire britannique a été submergée par une volonté inspirée par des idées simples et claires. » [Albert Einstein, « Comment je vois le monde », page 52.]

Lord Bertrand Russell : un cheval de Troie au sein de la communauté scientifique

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Bertrand Russell

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Albert Einstein et Léo Szilard

Derrière le trio de Léo Szilard, Eugene Wigner et Edward Teller qui rencontrèrent Albert Einstein et le persuada de signer la lettre à Roosevelt, se trouve Lord Bertrand Russell qui, par son appartenance aux plus hauts niveaux du renseignement britannique, savait très bien que l’idée qu’Hitler était commis à bâtir une arme à fission nucléaire était un mensonge éhonté [3]. Russell savait qu’Hitler ne commanditerait pas une telle recherche et savait également que les scientifiques autour du professeur Werner Heisenberg en Allemagne ne consentiraient pas à bâtir une telle arme pour le régime hitlérien.

Peu de temps après que Truman ordonna de lancer sur le Japon les deux bombes atomiques que possédaient les États-Unis, « Bertrand Russell entreprit d’empêcher les Russes de mettre au point leur propre capacité nucléaire. Il proposa à cette fin, dans le « Bulletin of the Atomic Scientist » de septembre 1946, que les états-Unis lancent une attaque nucléaire « préventive » contre l’U.R.S.S. Le pacifisme qu’il avait affiché toute sa vie durant prenait alors une forme pour le moins délirante. » [4]

En avril 1958, le groupe Pugwash tient sa deuxième conférence internationale au Lac Beauport près de Québec. Pugwash fut créé à Londres en 1955 par Lord Bertrand Russell en tant que « back-channel » britannique et instrument à travers lequel l’Empire britannique pouvait influencer les politiques militaires des deux superpuissances de l’époque. à cette conférence le scientifique Léo Szilard y énonce pour la première fois en public une stratégie de guerre nucléaire limitée. Szilard affirme qu’il serait envisageable d’attaquer une ville d’U.R.S.S. avec une ogive nucléaire et que la riposte serait une frappe nucléaire soviétique sur une ville américaine de population équivalente et qu’il y aurait ensuite une pause dans la guerre afin de négocier ! [5]

Szilard servit de modèle au réalisateur Stanley Kubrick pour son film « Le Docteur Folamour ».

« Une frappe nucléaire pour sauver des millions de vies » : la même propagande de guerre utilisée contre le Japon en 1945 est aujourd’hui utilisée contre l’Iran

Suivant les recommandations de son Secrétaire à la Guerre Henry Stimson, le Président Harry S Truman donna l’ordre d’utiliser deux bombes atomiques contre le Japon : Hiroshima le 6 août 1945 et Nagasaki le 9 août 1945. Il n’y avait aucune raison militaire pour justifier ce bombardement atomique.

Au mois de février 1947, un comité de l’establishment américain ordonna à Stimson (retraité) d’apposer sa signature sur un article qu’ils rédigèrent pour le magazine américain à grand tirage, Harper’s, [6] dans lequel « Stimson » justifiait sa décision de larguer les 2 bombes et exposait « sa » vision du nouvel ordre mondial d’après-guerre.

Le « big lie », qui avait été invoqué dès le 7 août 1945, était que les 2 bombes atomiques avaient accéléré la fin de la guerre avec le Japon et ainsi contribué à sauver la vie d’un million de soldats américains, y compris la vie d’innombrables soldats alliés et même évitait des pertes inutiles de vies humaines parmi les troupes japonaises !

La vision des élites anglo-américaines de l’empire était la mise en place éventuelle d’un gouvernement mondial, comme le promouvait ouvertement le « philosophe-savant » Lord Bertrand Russell. La menace du champignon nucléaire amènerait les gouvernements nationalistes à plier et à renoncer à leur souveraineté devant les diktats des financiers anglo-américains. La première victime avait été le Japon, mais les vraies cibles étaient l’U.R.S.S. et, éventuellement, la France sous de Gaulle !

Truman et Obama

Mais dès 1945, le blocus naval contre le Japon commençait à porter fruit et la reddition était une question de mois. Ceci était connu.

Ce qui était tenu plus au secret était la négociation, entreprise par l’Office of Strategic Services (OSS) et son directeur William J. Donovan, pour le compte du Président Roosevelt (décédé le 12 avril 1945). L’Empereur Hirohito négociait avec Roosevelt la capitulation depuis plusieurs mois, via le secrétaire d’état du Vatican, le cardinal Giovanni Montini, le futur Pape Paul VI. Max Corvo, officier de l’OSS en Italie durant la guerre était le relais entre Roosevelt et Montini.

Une campagne massive fut orchestrée par des agents britanniques au sein de l’OSS, la faction des Allen Dulles et James Jesus Angleton qui étaient dans l’orbite des financiers de « la City », pour discréditer le Vatican [7] afin de neutraliser la preuve qui aurait exposé la supercherie de la soi-disant nécessité de bombarder Hiroshima et Nagasaki.

C’est bien sous ce « petit homme » Truman, le pantin de Winston Churchill, que commença la terreur et la chasse aux sorcières aux États-Unis et non pas dans les années 50 avec le sénateur Joseph McCarthy, comme le racontent la plupart des commentateurs et « historiens ». Le Congrès américain aurait dû chasser Truman de la Maison Blanche pour empêcher un des pires crimes de l’Histoire. En ce début d’année 2012, il est encore temps d’éviter le pire en chassant Barack Obama de la Maison Blanche, cet agent d’influence de « la City », par un procès en destitution pour violations répétées de la Constitution américaine ou en invoquant contre ce président l’article 4 du 25e amendement [8] de la Constitution. Ne pas se débarrasser d’Obama maintenant, c’est augmenter le risque de non seulement qu’une frappe nucléaire « préventive » soit lancé contre l’Iran, mais qu’un conflit thermonucléaire généralisé soit déclenché impliquant les États-Unis contre la Russie [9] et la Chine !

Aujourd’hui, Benjamin Netanyahou, le fils du secrétaire particulier de Vladimir « Hitler » Jabotinsky, fidèle au pedigree familial d’agent d’influence britannique, proclame haut et fort qu’une frappe « préventive » avec les armes nucléaires B-61, dites « bunker busters », sur les centres de recherche nucléaire des villes iraniennes de Natanz, Isfahan, et Arak, sauveraient des millions de vies israéliennes !

Une telle propagande de guerre, hier comme aujourd’hui, semblera crédible pour un large segment de population qui vit au quotidien les difficultés d’un conflit armé prolongé et devient un témoin passif des atrocités de la guerre.

Nous ne pouvons sous-estimer le danger réel que représentent les « justifications » pour faire l’usage d’armes de destruction massive : ce sont les précurseurs d’une crise stratégique qui est déjà parmi nous.

La résistance organisée contre une telle hécatombe ne peut-être victorieuse si son action est limitée à une simple opposition. L’antidote au désarroi existentiel de nos populations est de raviver ce que le poète Friedrich Schiller appelle « l’étincelle divine » chez l’homme. Ceci peut-être singulièrement accompli à travers les œuvres qui célèbrent la créativité inhérente de l’homme et sa nature à la fois une et complexe.

Une humanité qui ne sait plus reconnaître les verdicts de l’esprit est mûre pour accepter le terrorisme d’un régime autoritaire.

Le désir « de pouvoir enfermer un contenu infini dans une forme finie n’a pas le moins du monde disparu de l’humanité actuelle »… Le discours musical de Beethoven permet un point d’accès privilégié à notre humanité véritable alors qu’il rend vivant dans son œuvre « l’art de la maîtrise de soi, et de la lutte avec soi-même pour arriver à la clarté et l’harmonie ». (Wilhelm Furtwängler, [10] Beethoven et nous, (1951) dans Musique et Verbe, Paris, éd. Albin Michel, 1963)

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Wilhelm Furtwängler

Furtwängler poursuit son commentaire :

« Beethoven a pour principe de prendre l’auditeur au sérieux, et ceci, même, à un point extraordinaire. Il ne voit pas en lui un partenaire qu’il se doit de persuader, de surprendre ou de terroriser, selon les divers procédés en faveur depuis quelques temps. Il rejetterait avec une indignation profonde de telles méthodes, qui depuis son époque ont pris toutes les formes possibles. Les rapports de Beethoven et de l’auditeur reposent sur la nécessité d’une logique qui ne doit ni ne peut jamais se relâcher. Les liens constants qui existent entre Beethoven et le public montrent et prouvent qu’il est parvenu à une communion profonde avec les auditeurs, qu’il arrive à les convaincre et à être vraiment compris par eux. Il voit donc dans l’auditeur un partenaire de valeur réelle. Non seulement il le prend au sérieux, mais au sens chrétien du mot, il le considère comme son prochain – qu’il faut aimer comme soi-même. Il le prend aussi au sérieux qu’il se prend lui-même.

« On peut dire ainsi que Beethoven, non seulement présuppose un auditeur de qualité valable, mais qu’il l’exige. C’est pourquoi chaque bonne exécution d’une œuvre beethovenienne crée une véritable communion. Son art suit le même chemin que toutes les influences qui agissent réellement sur une collectivité.

«  … Beethoven qui par son art a acquis ce rare pouvoir sur les hommes, n’a pas soif de puissance. Il ne veut pas savoir plus et mieux que les autres, ainsi que le font nombre de compositeurs actuels, figés dans un isolement orgueilleux. Il ne s’écarte pas de la communauté. Ce n’est pas non plus un romantique, dans le sens excessif que l’on donne à ce mot ; il n’est pas exalté, il ne s’égare pas, il ne s’attendrit pas sur lui-même, il ne « terrorise » pas… et c’est l’aspect de son message qui le lie le plus à nous. Car il est clair que la crise musicale que nous vivons aujourd’hui est, au sens propre, une crise provoquée par le manque de communion (il en est de même pour les différents domaines, culturels, politiques ou autres…). Pour ce qui est de la musique, de véritables sectes ne se sont-elles pas formées, — des groupes contradictoires, qui de façon risible semblent tirer vanité de se sentir inconciliables au sens le plus absolu du terme. Si ridicule que cela paraisse, entre un musicien actuel qui s’affirme moderne et un musicien élevé et formé dans le respect des traditions, il semble y avoir plus qu’un mot d’ordre : terreur et extermination !

« Ce que sous-entend naturellement toute époque équilibrée, toute productivité normale : le sentiment de l’inépuisable diversité de la Nature – traduite si heureusement par le proverbe « Tous les chemins mènent à Rome » — tout cela semble aujourd’hui bien oublié.

« En effet chacun ne paraît plus comprendre, ni connaître que le chemin auquel il est voué corps et âme, Dieu sait pourquoi ! Il n’est donc pas étonnant qu’en fin de compte cette grande crainte que faisaient naître certaines tendances et qu’aujourd’hui elles aspirent allégrement à pousser plus loin encore, amène finalement l’état, dans un régime autoritaire, à y répondre et à s’y opposer à sa façon, avec son propre genre de terrorisme, en imposant un concept comme celui de « l’Art dégénéré » ! La façon dont Beethoven pense la musique, et dont il s’épanche dans l’âme de la communauté humaine (c’est là peut-être qu’est pour nous sa plus haute portée) n’est en aucun cas dépendante de ce genre de menaces. Il n’y a en effet menace de terreur que quand les autres moyens ont échoué : seule, une humanité qui ne sait plus reconnaître les verdicts de l’esprit, est mûre pour accepter de telles décisions, imposées par des pouvoirs publics abusifs.

« Beethoven, lui, décide lui-même, et ce n’est pas par l’autorité et la crainte qu’il fait participer tout le monde à ses décisions. A l’égard de sa musique, tout procédé de « terreur » est de ce fait sans objet. Le problème : individu et communauté – nœud de toutes nos crises spirituelles actuelles —, perd toute sa signification en présence de cette musique beethovenienne, qui est riche d’ivresse et de passions tout en étant portée au plus haut point de clarté et de simplicité ; elle harmonise de ce fait une expérience individuelle et l’expérience de la communauté.

« Ainsi la musique de Beethoven reste pour nous un grand exemple d’accord unanime où se rejoignent toutes les tendances, un exemple d’harmonie entre la langue des sons et la langue des âmes, entre la construction musicale et le déroulement d’un drame inhérent à l’existence même de l’âme humaine – l’accord entre le Moi et l’Humanité, entre l’âme anxieuse de l’individu isolé, et la communauté dans son universalité. Les vers de Schiller : « Frères, au-dessus de la voûte des étoiles doit siéger un père aimant », [11] que Beethoven a projetés dans toute leur lumière à la fin de son message de la Neuvième Symphonie, ne sont pas sortis de la bouche d’un prédicateur ou d’un démagogue ; c’est que lui-même a eu comme idéal de vie dès le début de son activité créatrice, et c’est aussi la raison pour laquelle nous-mêmes, hommes d’aujourd’hui, sommes encore si profondément touchés par un tel message ». (Wilhelm Furtwängler, Beethoven et nous, 1951 – dans Musique et Verbe).


[1Lettre Einstein-Szilard datée du 2 août 1939 (traduction française).

[2Albert Einstein, « Comment je vois le monde », Flammarion, 1979, 189 pages.

[3Thomas Powers, “Heisenberg’s War : The Secret History of the German Bomb” (Boston : Little, Brown & Co., 1994).

[5Gilles Gervais, « Obama et la guerre nucléaire ».

[9La proposition de la Russie pour éviter un conflit nucléaire : vidéo : « Contre la guerre, l’Initiative de Défense de la Terre ».

[10Une Interview avec Mme Elizabeth Furtwängler,1986 dans l’Executive Intelligence Review , Vol.13, no. 4, January 24, 1986 (sur la persécution du célèbre chef d’orchestre à la fois par le régime nazi et les services de renseignement anglo-américain d’après-guerre).

[11Friedrich Schiller : « L’Ode à la Joie ».